Olivier Joyard

Olivier Joyard

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Les 20 meilleures séries à mater sur Netflix

Les 20 meilleures séries à mater sur Netflix

Envie de binge-watcher ce qui se fait de mieux sur petit écran ? Après vous avoir régalés en films en tout genre, votre magazine préféré vous balance la crème de la crème des séries sur le mastodonte des sites de streaming : Netflix. Le temps d'un giga-dossier, on vous a sélectionné ce qui se fait de mieux sur la plateforme américaine : des créations originales, des mini-séries, des anthologies et des animés. Le tout avec une volonté : montrer la diversité des points de vue et des expériences. Pour cela, on a demandé à notre journaliste Olivier Joyard (critique, documentariste et scénariste) ses 20 programmes incontournables sur Netflix. Et n’oubliez pas de faire des pauses entre les saisons ! Recommandé : Les 50 meilleures séries de tous les temps
Les 70 meilleurs films à mater sur Netflix

Les 70 meilleurs films à mater sur Netflix

Paul Thomas Anderson, Quentin Tarantino, Alejandro González Iñárritu, Christopher Nolan, les frères Safdie… Mais aussi, côté franchouillard, Abdellatif Kechiche, Mia Hansen-Løve, Arnaud Desplechin… Depuis quelques années, on ne compte plus les grands noms du cinéma d’auteur qui viennent peu à peu agrémenter le catalogue du mastodonte du streaming : Netflix. Alors, pour s’y retrouver dans une offre assez inégale, entre pur chef-d’œuvre scorsesien et comédie douteuse, votre magazine préféré a décidé de sélectionner, avec beaucoup de subjectivité (forcément), la crème de la crème des films sur Netflix. Vous y trouverez tant des créations originales (Roma, Marriage Story, The Irishman...) que les nouvelles acquisitions du mastodonte américain. D’autant plus que le dossier est amené à évoluer : en quelques mois, Netflix a acquis les droits de diffusion du mythique Studio Ghibli (21 films au total) avant de signer un partenariat avec MK2, lui permettant de diffuser 12 films de Truffaut (qui fait à lui seul l’objet d’un dossier), mais aussi le maître du rêve au cinéma, David Lynch (mais pas ses meilleurs). Au final, pas évident de choisir parmi plus de 4000 programmes... Surtout qu'il a fallu varier les genres et les gens (ba oui, on n'allait pas mettre tous les films de Scorsese en haut de la liste). Bref, sans plus attendre, voici les 70 films à mater en priorité sur Netflix selon nous. On parie que vous ne les avez pas tous vus !
Les 50 meilleures séries de tous les temps

Les 50 meilleures séries de tous les temps

Résumer l’amour des séries en 50 titres emblématiques ? L’exercice est à la fois excitant et complexe. Le genre a explosé depuis une vingtaine d’années mais traverse la culture pop depuis 75 ans. En établissant ce classement, une évidence nous a sauté aux yeux : les séries couvrent depuis toujours une diversité de points de vue et d’expériences fascinante. D’abord conçues exclusivement pour le grand public, elles se sont enrichies ces dernières décennies d’approches parfois radicales venues de toute la planète et de chefs-d’œuvre aussi importants que les grands totems de la littérature ou du cinéma. Si elles prennent le pouls du monde avec une pertinence imparable, certaines sont encore méconnues. Nous espérons avec ce dossier susciter découvertes et curiosité.
Joaquin Phoenix, joker sans fard

Joaquin Phoenix, joker sans fard

On craignait une star caractérielle, quittant l’interview à la moindre question bête. Pourtant, c’est un Joaquin Phoenix cool et sincère qui a évoqué son rôle marquant dans la peau de l’éternel rival de Batman. Film de l’automne, le fascinant Joker raconte les blessures originelles et la métamorphose en psychopathe de ce personnage brutal, qui va comme un gant à cet habitué des héros déglingués. Un personnage comme le Joker, faut-il l’aimer pour le jouer ? Honnêtement, cela a été un défi. Parfois, en lisant le scénario, je ressentais de la sympathie pour lui, à d’autres moments, j’étais écœuré par son comportement. Aucun putain de sens. Il était pathétique, chouineur. Ce que j’ai identifié, ce sont les traces de stress post-traumatique en lui. Attaqué par des gamins au début du film, il se met en mode statue, incapable de répondre. Ce mec a subi des abus physiques durant son enfance. C’est difficile de ne pas avoir de l’empathie pour un homme qui a vécu ça. Ces choses-là vous changent le cerveau, concrètement. Cela a vraiment transformé mon point de vue. Au départ, j’avais envie de l’envoyer se faire foutre. Vous êtes-vous renseigné sur les troubles mentaux en préparant le rôle ? J’ai regardé des vidéos et j’ai lu deux livres spécifiques. Je ne vais pas vous dire lesquels, pour ne pas mettre en avant les criminels dont ils parlent. L’hypothèse qui en ressort, c’est que les assassins à motivation politique et les tueurs de masse possèdent des personnalités proches. On apprend
Time Out rencontre Xavier Dolan

Time Out rencontre Xavier Dolan

Cette année, Xavier Dolan fête ses trente ans de présence sur Terre et déjà ses dix ans de cinéma. Une boucle commencée en 2009 avec la solitude de J’ai tué ma mère et qui s’achève dans le tremblement collectif de Matthias et Maxime, son nouveau film, plongée émouvante dans la vie d’un groupe de potes doublée d’une comédie romantique nouveau genre. Une œuvre de transition, comme dit Dolan, et qui lui va bien au teint. Ce qu’on lui a immédiatement fait remarquer quand il s’est assis face à nous. Vous avez l’air heureux. Je le suis ! Matthias et Maxime est un film énergique, libre, loin d’Hollywood. Délivré ? J’ai longtemps cherché l’approbation, la validation des autres, mais j’ai compris que je ne pouvais plus espérer être aimé par tout le monde. Faire ce film, ainsi que les deux autres avant – Juste la fin du monde, Ma Vie avec John F. Donovan –, m’a affranchi de ce besoin d’acceptation. J’ai trouvé auprès de mes amis la seule validation dont j’ai besoin aujourd’hui. Ce long-métrage est d’ailleurs parti du désir de raconter ma transformation au contact de nouvelles amitiés. Ma rencontre il y a quelques années avec celles et ceux qui jouent dans Matthias et Maxime a été salvatrice.                                « Dans ma vie, j’ai passé beaucoup de temps seul » Avant, vous n’aviez pas d’amis ? J’avais de très bons amis, mais je ne connaissais pas le sentiment de communauté. Je ne l’ai connu qu’après mes 25 ans. A l’adolescence, on se forge des amitiés. Ensuite, comme vous
Joaquin Phoenix: "En algunos momentos Joker me generaba empatía y en otros repulsión"

Joaquin Phoenix: "En algunos momentos Joker me generaba empatía y en otros repulsión"

La película más esperada del otoño, 'Joker', de Todd Phillips, explica cómo un pobre cómico fracasado se transforma en el psicópata de Gotham que todos conocemos y tememos. Descubrimos a un Joaquin Phoenix agitado y terrorífico que ya se ha colocado en todas las quinielas de los Óscars. Nosotros hablamos. ¿Te tiene que gustar un personaje como Joker para interpretarlo?Sinceramente, fue un reto. En algunos momentos, mientras leía el guion, me despertaba empatía. En otros, repulsión. No tenía ningún sentido. Era patético, estridente. Ahí vi rastros de un desorden de estrés postraumático. Cuando lo atacan los niños, al principio de la película, se queda congelado como una estatua, es incapaz de responder. Cuando era pequeño abusaron físicamente de él. Es difícil no sentir algún tipo de compasión por alguien que ha pasado este trance. Algo así te gira el cerebro, la manera de pensar. Esto hizo que cambiara mi modo de ver al personaje. Al principio, solo quería que se fuera a la mierda. ¿Cómo te preparaste para el papel? ¿Estudiaste trastornos mentales?Vi algunos vídeos y leí dos libros en particular. No te diré cuáles, porque no quiero que los criminales de los que hablan reciban más atención de la que merecen. La idea general era que los asesinos masivos tienen personalidades similares. Antes de 1963, aparentemente, había dos categorías identificadas: los extremistas políticos y los locos. Después los medios abrieron el espectro a muchas otras modalidades. Esto me parecía intere
Time Out meets Joker's Joaquin Phoenix

Time Out meets Joker's Joaquin Phoenix

The most anticipated film of the fall, Joker examines how a failed stand-up comedian and troubled loner morphs into the Gotham psychopath we all know and dread. The movie’s star, Joaquin Phoenix, unleashes a jittery, terrifying turn that’s already gathering Oscar buzz. The actor himself has a rep for being an occasionally tense sit-down—“Most of the time, I just try to get to the end of interviews,” he tells us, unpromisingly—but we caught him on a good day: direct, laid-back and eager to chat about his turn as the DC supervillain.  Do you need to like a character in order to play him?Frankly, this was a challenge. Sometimes, while reading the script, I felt sympathetic. Other times, I was repulsed. It made no fucking sense. He was pathetic, whiny. I saw traces of post-traumatic stress disorder in him. When Arthur is attacked by kids at the start of the movie, he freezes up like a statue, unable to respond. This guy was physically abused when he was a child. It’s difficult not to feel some empathy for someone who’s been through that. That sort of thing changes your brain, the way you think. But at the start, I wanted him to go fuck himself. Did you study mental health problems in any way? I watched some videos and read two books in particular. I’m not going to tell you which ones, as I don’t want to give the criminals they’re about more attention than they deserve. The general idea was that political assassins and mass murderers have similar personalities. On the one hand, Ar
Joaquin Phoenix: ‘I wanted the Joker to go f**k himself’

Joaquin Phoenix: ‘I wanted the Joker to go f**k himself’

The most anticipated film of the autumn, ‘Joker’ examines how failed stand-up Arthur Fleck morphed into the Gotham psychopath we all know and dread. Its star Joaquin Phoenix is the film’s beating heart in a jittery, terrifying turn that’s already gathering Oscar buzz. The man himself has a rep for being an occasionally scratchy interviewee – ‘Most of the time I just try to get to the end of interviews’, he tells me, unpromisingly – but the Phoenix I encounter is direct but laid-back, and eager to chat about his turn as the DC supervillain.  Do you have to like a character like the Joker to play him?‘Frankly, it was a challenge. Sometimes, while reading the script, I felt sympathetic, other times I was repulsed. Made no fucking sense. He was pathetic, whiny. I saw traces of post-traumatic stress disorder in him. When he’s attacked by kids at the start of the movie, he freezes up like a statue, unable to respond. This guy was physically abused when he was a child. It’s difficult not to feel some empathy for someone who’s been through that. That sort of thing changes your brain, the way you think. And it made me change how I see his character. At the start, I wanted him to go fuck himself.’  How did you prepare for the role? Did you study mental health problems in any way? ‘I watched some videos and read two books in particular. I’m not going to tell you which, as I don’t want to give the criminals they’re about more attention than they deserve. The general idea was that politic

Listings and reviews (26)

There Will Be Blood

There Will Be Blood

5 out of 5 stars
Pour devenir l’un des cinéastes les plus pertinents et talentueux des vingt dernières années, Paul Thomas Anderson a dû dépasser son statut de chroniqueur scorcesien de la vie débauchée de Los Angeles pour explorer la crise de confiance du mâle américain. There Will Be Blood a opéré ce tournant, déployant la figure du malfrat sous les traits d’un baron du pétrole. Le héros, Daniel Plainview, s’y impose comme une version ultra-flippante de Daniel Day-Lewis, le genre de mec qui menace (dans une scène cultissime) de terminer votre milk-shake avant de vous fracasser la tronche. Bien aidée par la musique de Jonny Greenwood de Radiohead (qui signe là son entrée dans la caste des grands compositeurs de ce siècle), la saga épique de « PTA » dialogue à travers les décennies avec le cynisme de Chinatown (Polanski), son ancêtre 70’s. Comme Phantom Thread l’a démontré en 2017, le réalisateur n’a pas perdu le sens de l’humour de ses débuts. Mais à un moment, Anderson a eu besoin de s’affirmer en devenant sérieux. C’était le moment There Will Be Blood !
Le Château dans le ciel

Le Château dans le ciel

5 out of 5 stars
Dans cette première production du Studio Ghibli (fondé en 1985), Hayao Miyazaki fait preuve d’audace en imaginant une flotte de machines volantes vintage. Le film suit une jeune fille pleine de rêves qui se demande si le cristal lumineux dont elle a hérité la mènera jusqu’à la cité volante légendaire de Laputa – un emprunt du réalisateur aux Voyages de Gulliver de Jonathan Swift. Le plaisir intense des scènes de poursuite et de combat en suspension reste aussi fort aujourd’hui, malgré les moyens technologiques rudimentaires dont disposaient les animateurs du studio japonais. Un fond écologique très contemporain sous-tend le film et le rend pertinent en 2020, mais c’est d’abord – et surtout – sa grande puissance d’imagination qui séduit. Le paysage de Laputa est de toute évidence le produit d’un visionnaire de génie.
Roma

Roma

5 out of 5 stars
Avec Gravity, le cinéaste mexicain Alfonso Cuaron (connu également pour le road trip érotique Y Tu Mamá También, le thriller dystopique Les Fils de l’homme et Le Prisonnier d’Azkaban, aka le meilleur Harry Potter) transformait un thriller de science-fiction à grand spectacle en étude intime de personnage dans l’immensité de l’espace. Roma, sa merveille très personnelle en noir et blanc, passe à l’inverse du micro au macro : tout commence par les détails d’une vie, enchaînant progressivement sur la réalité sociale et politique de Mexico dans les années 70, dans le quartier même où le réalisateur a grandi. Construit par Cuaron comme une élégie sobre et sensible de son enfance auprès de Cléo, la domestique qui l’a élevé, Roma rejoint d’autres grands portraits de femme au cinéma comme Jeanne Dielman de Chantal Akerman, en nous plaçant au cœur d’une expérience physique. En bref : un chef-d’œuvre immersif, du cinéma pur. Et profondément humain.
The Lost City of Z

The Lost City of Z

5 out of 5 stars
L’explorateur britannique Percy Fawcett s’est perdu dans la jungle amazonienne en 1925. Son histoire fascinante convoque tous les marqueurs du film d’aventures : trahisons, cannibalisme, têtes réduites et piranhas flippants. Dans les mains de l’éternel outsider hollywoodien James Gray (The Yards, Ad Astra), la quête de cet antihéros incarné par Charlie Hunnam est d’abord l’occasion de filmer une errance obsessionnelle et contemplative, en murmurant à l’oreille d’un certain cinéma des années 70 – Coppola, Werner Herzog. De Londres aux rives de l’Amérique du Sud, le film interroge nos ambitions intimes et leurs limites parfois mortelles. La grandeur de The Lost City of Z réside à la fois dans son ambition et sa modestie, la manière dont James Gray croit à la force épique du cinéma classique. Un bain de jouvence pour les yeux.  
Moonlight

Moonlight

5 out of 5 stars
Le premier miracle de Moonlight – et ce film crève-cœur en regorge – a lieu à table. Le jeune Chiron, 10 ans, a été harcelé dans la rue. Les deux adultes présents à ce dîner ne sont pas ses parents, mais ils trouvent les mots justes pour répondre à sa question : « Est-ce que je suis une tapette ? » Barry Jenkins explore des aspects peu vus de l’expérience afro-américaine avec une voix poétique et montre des aspects de Miami que l’on ne connaît pas au cinéma. Mais ce qui ressort en premier dans le film tient à sa manière radicale de scruter des turbulences sexuelles éloignées des stéréotypes. Dans le cadre des récits gays, nous sommes loin de Brokeback Mountain, pour nous rapprocher de l’atmosphère anxieuse et planante du génie hip-hop Frank Ocean. Dans le film, Chiron grandit, devenant un adolescent hanté par ses désirs, puis un adulte ténébreux dans la partie finale, peut-être la plus belle, lorsqu’il retrouve la compagnie d’un vieil ami. Le genre de film qui nous rappelle pourquoi on aime le cinéma.
The Irishman

The Irishman

4 out of 5 stars
Y a pas à dire : le dernier film en date de Martin Scorsese est souvent électrisant, même quand la caméra décide d’explorer les maisons de retraite pour gangsters – là où les moins chanceux finissent, apparemment. Déplié sur plusieurs décennies alors que les acteurs sont rajeunis à coups d’effets numériques (le « de-aging », plutôt une réussite), le pharaonique The Irishman porte sur la fascination du réalisateur pour les derniers instants de lumière et sur la destination finale de quelques vies au moment où les mafieux ressentent (parfois si peu) le poids de la culpabilité… Le tout en désacralisant avec brio la pègre. De Niro se glisse dans la peau de Frank Sheeran, un conducteur de camion devenu tueur à gages pour la mafia qui revient sur sa vie, tandis qu’Al Pacino joue le puissant syndicaliste Jimmy Hoffa. On croise également Joe Pesci pour compléter la dynastie… Les insultes fusent, la violence et la mélancolie ne sont jamais loin dans cette longue saga tardive d’un cinéaste mythique qui regarde la mort en face. Et les ravages du temps.
Marriage Story

Marriage Story

5 out of 5 stars
Noah Baumbach commence son film de rupture sur une note de douceur, quand Nicole (Scarlett Johansson) et Charlie (Adam Driver) se remémorent leurs jours heureux. Mais très vite, le ton change et le réalisateur de Frances Ha plonge dans l’anatomie d’un couple à la manière de Bergman – Scènes de la vie conjugale est l’un des modèles du film. Johansson, en comédienne insatisfaite, a rarement montré autant de douleur et de talent que dans ce film, tandis que Driver, qui joue un metteur en scène brooklynien imbu de lui-même, n’a jamais été aussi… vicieux. Entre New York et Los Angeles, leur clash amer se déploie dès lors sans limites, comme une guerre de tranchées verbale animée par leurs avocats – joués par les géniaux Alan Alda et Laura Dern. En grattant sous la surface des sentiments, Baumbach teinte d’universalité cette comédie de caractères très marquée socialement. Un film pour tenir compagnie à toutes celles et ceux qui se sont sentis trahis par leurs propres espoirs.
Uncut Gems

Uncut Gems

5 out of 5 stars
Joshua et Benny Safdie ont renouvelé le cinéma indépendant new-yorkais depuis une décennie avec des films la plupart du temps tournés à l’arrache avec peu de moyens. Après avoir donné à Robert Pattinson un rôle mémorable dans Good Time, les trentenaires chics s’amourachent ici d’Adam Sandler, en le suivant frénétiquement et à la trace tout au long du film. Son personnage dérangé de vendeur de diamants passant une sale semaine (nous sommes en 2012) parvient à émouvoir au milieu de chaos qui rythme son quotidien. Et rayon chaos, les frères Safdie s’y connaissent et s’y sentent bien, saturant leur film de néons et de bruits éclatants, captant l’énergie d’une ville et le désespoir d’une vie qui dérape. On peut trouver l’ensemble un peu chargé, mais le travail du chef opérateur Darius Khondji (Seven, notamment) force le respect, tout comme la sincérité folle déployée pour sublimer les artifices du cinéma. Derrière ce portrait d’un type au bout du rouleau aux choix discutables, Josh et Benny Safdie nous parlent aussi d’eux-mêmes et de leurs failles avec un certain courage. Bravo !
Carol

Carol

5 out of 5 stars
Inspiré d’un roman de jeunesse signé Patricia Highsmith, le sixième long-métrage de Todd Haynes (Velvet Goldmine, Loin du paradis) se glisse dans les vies contrariées de deux femmes amoureuses dans les années 1950. Jouées par Cate Blanchett et Rooney Mara, elles se rencontrent dans un grand magasin new-yorkais où l’une travaille comme vendeuse tandis que l’autre, mariée, vient y faire ses achats. Elles entament une relation timide et interdite : le monde contre leur bulle. Avec une délicatesse infinie, Haynes filme la naissance du désir lesbien et sa répression simultanée par les codes normatifs. Carol se déploie alors comme un beau mélodrame et un grand film d’amour où rien ne compte plus que deux mains ou deux bouches qui se frôlent, où les détails des sentiments chuchotés s’incarnent avec fièvre. On pense parfois à In the Mood for Love de Wong Kar-wai, ce qui situe l’intensité de cette romance qu’on n’oublie pas.
Le Conte de la princesse Kaguya

Le Conte de la princesse Kaguya

5 out of 5 stars
Cette splendeur est le chant du cygne du grand réalisateur d’animation Isao Takahata, décédé en 2018. Le cofondateur du Studio Ghibli n’a jamais atteint la renommée internationale de son partenaire plus prolifique, et peut-être plus accessible, Hayao Miyazaki. Il n’en reste pas moins grand. Le Conte de la princesse Kaguya est un film délicat ancré dans le folklore japonais. On y découvre une fille de paysans qui devient princesse et se construit une vie au palais impérial. Malgré ses sources mythologiques, le film ne s’appuie pas sur un univers de fantasy, préférant un récit simple aux couleurs pastel élégantes, où s’invente une histoire d’amour saupoudrée de satire sociale. Le récit décolle à mi-parcours avec l’une des plus belles scènes de tout le catalogue Ghibli. Nous ne sommes pas vraiment devant un film pour enfants. Le Conte de la princesse Kaguya demande patience et ouverture d’esprit, offrant en retour une méditation douloureuse sur l’amour, le grand âge et la dignité au moment de quitter ce monde. Des adieux émouvants.
Kiki, la petite sorcière

Kiki, la petite sorcière

5 out of 5 stars
Quand la série de livres Harry Potter est sortie, un sentiment immédiat de familiarité s’est emparé du public, J. K. Rowling s’inspirant de sources reconnaissables comme les romans d’Anthony Buckeridge. La romancière n’est pas la première à s’être inspirée du passé pour recréer, comme le prouve Kiki la petite sorcière, adapté par Hayao Miyazaki de l’œuvre pour enfants d’Eiko Kadono. L’histoire d’une sorcière ado, de son chat toujours de mauvaise humeur et d’une petite ville endormie au bord de la mer où la jeune femme lance un service de livraison par les airs. Au fond, la vraie histoire se situe ailleurs. Elle est presque impossible à décrire, cachée dans les interstices des scènes et dans les regards. C’est le génie de Miyazaki : dans les mains d’un grand réalisateur, ce récit d’apprentissage tranquille devient tout autre chose que ce qu’on pourrait en attendre, tel un conte à la fois étrange, beau et bouleversant.
Porco Rosso

Porco Rosso

5 out of 5 stars
Le plus impressionnant avec le scénariste-réalisateur-producteur et patron du Studio Ghibli n’est pas seulement son imagination (pourtant très vaste), ni sa compassion (qui n’a pas de fin), mais son extraordinaire confiance en la fiction. Il faut être un homme remarquable pour avoir l’idée d’un film situé en Italie juste avant la Seconde Guerre mondiale, où le héros n’est autre qu’un cochon magique conduisant des avions. Après trois ans de travail est né l’un des grands accomplissements du maître Miyazaki, bourré de charme, d’empathie, d’ironie historique et d’humour à froid. Porco Rosso est aussi – et c’est peut-être le plus important – un chant d’amour au cinéma comme rempart face à la barbarie. Le film est à la fois inspiré par le septième art et ses stars (d’Errol Flynn à Humphrey Bogart) et plein de références directes à l’amour qu’il provoque chez ses spectateurs, à travers les magazines que lit le héros porcin ou les dessins animés qu’il aime tant regarder.

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Sofia Coppola dans les yeux de Priscilla Presley

Sofia Coppola dans les yeux de Priscilla Presley

Pour beaucoup, elle est celle qui a vécu dans l’ombre du King. Mais Priscilla Presley méritait aussi que son histoire soit racontée, avec toute l’intensité et la délicatesse nécessaire, à travers le regard d’une sœur. Voilà ce qui est passé par l’esprit de Sofia Coppola en tombant il y a quelques années sur le livre de mémoires Elvis et moi, que Priscilla Presley, aujourd’hui âgée de 78 ans, avait publié en 1985. « Il traînait chez moi et j’ai fini par le lire après l’avoir longtemps ignoré », nous raconte la réalisatrice de 52 ans. « J’ai été surprise par le côté intime mais aussi universel de l’histoire. Je connaissais très peu de choses sur Priscilla, alors que c’est une célébrité dans la culture américaine. J’ignorais par exemple qu’elle avait vécu à Graceland (la résidence d’Elvis Presley à Memphis, achetée par le chanteur en 1957, ndlr) alors qu’elle était encore au lycée. Tout cela était difficile à croire et choquant. Elle en parle très bien dans son ouvrage. J’ai été aussi très attirée par l’univers visuel, ces années 1960 ultra américaines que j’avais envie de retranscrire. » Priscilla est le huitième long-métrage de Sofia Coppola. Il y a presque un quart de siècle, elle avait débuté avec un teen movie planant, le superbe Virgin Suicides (1999), avant de construire une filmographie quasi obsessionnelle autour de personnages féminins souvent isolés, déphasés dans leur tour d’ivoire. Chez elle, l’ennui et la solitude apparaissent toujours sublimés. On se souvient auss