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Baboins sauvages. Requins tueurs. Délire à l'opium. La suite de Ridley Scott, musclée, assoiffée de sang et parfois résolument décalée, n’est pas le Gladiator que vous connaissez – ni celui que vous enseignait votre prof d’histoire. Mais malgré ses défauts, c’est une aventure colossale qui ne ménage aucun effort pour vous épater par son ampleur et son spectacle.
Là où Gladiator (2000) mêlait habilement scènes de bataille et intrigues politiques subtiles, cette suite fonctionne mieux lorsqu'elle se concentre sur des moments d’action pure, comme lorsqu'une baliste est tendue et envoie une boule de feu en direction de votre tête. L’action dégage une extravagance brutale, une volonté de mettre en lumière la violence comme symptôme de l'effondrement social, avec une dose supplémentaire de membres tranchés et de plaies ouvertes.
Seize ans se sont écoulés depuis les événements de ce premier film désormais culte, et notre nouveau héros, Lucius Verus de Paul Mescal, est passé du statut de neveu de Commodus en péril à la fin de Gladiator à celui de père de famille amoureux vivant un exil heureux dans une ville côtière d'Afrique du Nord.
La première bataille navale met fin à tout cela. Une flotte de trirèmes romaines sous le commandement du général Marcus Acacius, incarné par Pedro Pascal, s'abat sur la citadelle de Lucius et de sa femme au bord de la mer. Ce qui s'ensuit déchaîne l'enfer à une échelle similaire à celle de la mêlée d'ouverture de Russell Crowe en Germanie dans le premier film, en passant par la vaste séquence du siège de Jérusalem dans Kingdom of Heaven. Scott n'a rien perdu de son sens du combat à grande échelle.
La majeure partie du film se déroule dans une Rome magnifiquement recréée grâce à un CGI (des effets spéciaux) bien plus avancé que le film précédent, visuellement révolutionnaire. Ici, un Empire romain en déclin est dirigé, de manière violente et impulsive, par les co-empereurs Caracalla et Geta (Fred Hechinger et Joseph Quinn de Stranger Things, couverts de fond de teint blanc et incarnant à fond les méchantes sœurs de Cendrillon). Ils tentent d'apaiser une population agitée par des jeux sans fin dans le Colisée, une véritable machine à broyer dans laquelle Lucius, captif et avide de vengeance, incarné par Mescal, est destiné à être sacrifié.
Malgré ses défauts, c'est une aventure colossale et terriblement divertissante.
Sous la houlette du gladiateur entrepreneur machiavélique Macrinus, incarné par Denzel Washington – l'équivalent du Proximo d'Oliver Reed dans le premier film – Lucius rassemble ses compagnons de combat contre des champions chevauchant des rhinocéros et participe à des batailles navales dans une arène inondée, infestée de requins affamés.
Le scénario de David Scarpa, aussi scénariste de Napoléon, s'attaque à l'idée d'une société civilisée qui sombre sous le joug d’un despotisme à la Make Rome Great Again et de sénateurs perfides, tandis que les généraux commencent à se lasser de cette folie. Les intrigues secrètes ne sont pas aussi subtiles que dans le premier film, et l'absence du jeu psychologiquement complexe de Joaquin Phoenix dans le rôle du méchant se fait sentir. Mais avec la flamboyance de Washington, le film dispose d'un atout majeur qui porte ses fruits dans une dernière partie captivante et parfaitement exécutée.
Et Mescal ? L'Irlandais prouve que son charisme fonctionne à merveille dans un blockbuster de cette envergure, sans perdre cette rare sensibilité qui a marqué ses rôles dans Aftersun et Normal People. Il n’atteint pas le niveau de Russell Crowe – qui le ferait ? – mais il prend suffisamment les rênes du char lancé à toute vitesse par Scott.