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L’angle des rues Marquette et Gilford, une fois animé pendant plus de 10 ans par la Maison Publique, n’aura pas resté inerte bien longtemps : une seconde maison, qui semble d’ailleurs déjà bien ancrée dans le Plateau Mont-Royal, a éclot.
C’est dorénavant l’ère du Violon.
Le bâtiment de pierres bourgogne révèle un rez-de-chaussée fenestré, sans toutefois exhiber le domestique de la maison.
On y sent un côté à la fois mystérieux et séduisant : le restaurant Le Violon se fait énigmatique, envoûtant, désirable… Sommes-nous à New York ?
Sitôt le passage entre les deux grandes plantes annonçant la porte d’entrée, nos ressentis se confirment. Les attentes quant à la salle sont assouvies. Du côté droit, une énorme toile de dalmatien — peinture réalisée par l’artiste et copropriétaire Dan Climan —, veille sur les clients.
Du côté gauche, on aperçoit le long bar mythique (remis au goût du jour) de la Maison Publique, faisant face à la cuisine, ainsi que trois tables de deux personnes le long des fenêtres. C’est élégant, raffiné, minimaliste. Les tables nappées de blanc se font très invitantes.
Moi et mon invité préférerons le menu dégustation carte blanche à 100$ au menu à la carte. « C’est le meilleur moyen de goûter à un maximum de plats », nous confie notre très souriante serveuse de la soirée, Kyra. (Un des quelques employés qui ont déménagé à Montréal du West Island pour suivre le chef Danny Smiles.)
Si l’accord vins pensé par Andrew Park se fait tentant, c’est davantage le Crémant d’Alsace 2019 de Pierre Frick, à 130$ et des poussières, qui nous comblera de bonheur de l’entrée au dessert — avec un entracte d’un vif Beaujolais au verre pour le plat d’agneau et les pâtes.
Première tablée, thon rouge con tomate et salade de homard doucement poché, sur chou-rave et concombre en crémeuse d’aneth. Le bal des « wow », « incroyable » et tout autre terme éloquent notre degré de satisfaction est lancé.
La salade de homard, malgré sa fraîcheur irréfutable, se fait toutefois très discrète aux côtés de son vis-à-vis le thon, absolument phénoménal.
Une réinterprétation du pan con tomate dont je vais me souvenir très longtemps : le tartare de thon est mélangé aux cubes de tomates coupées de manière à ne pas voir de différence et de l’eau de tomate, élégamment posé dans le fond d’une assiette semi-creuse, dans l’ombre d’une combinaison d’huile de tournesol et d’olive.
Les croûtons de la boulangerie Hof Kelsten, ceux-ci bien beurrés et assaisonnés, sera le meilleur support possible. C’est explosif, c’est vibrant, c’est vivant. Spectaculaire.
Le tartare de bœuf est habillé un peu comme le ferait un kibbeh nayyeh syrien : il est agrémenté de boulgour, d’un léger mélange d’épices et d’herbes, puis couvert d’un filet de tahini, de graines de sésame et de tomates cerises. On aime les différentes textures, la richesse du tahini, la tonicité de la tomate…
Puis, aux antipodes du profil léger et frais du repas jusqu’ici, arrive devant nous le pain irlandais (soda bread) garni de chanterelles présentées sur les chapeaux, laissant uniquement les pieds à la vue, ceux-ci submergés d’une sauce crémeuse au cheddar fort. Une baffe de richesse et de sapidité à chaque bouchée. On en veut encore, mais en même temps, on veut se conserver pour la suite.
Bar noir fondant, steak de tomate, beurre blanc, crème fraîche, aneth. Éclatant.
Côtelette d’agneau, sauce vierge, anchois ; petit clin d’œil au classique romain Abbacchio alla scottadito. Bon ? Bien sûr. Toutefois, le simple ajout des filets d’anchois à l’arraché m’a laissé un peu perplexe.
Le dernier feu d’artifice de la soirée s’est présenté dans un bol de pâte « à mi-chemin avec une soupe » nous dit-on : sorpresine fagioli. Traduction : des pâtes fraîches de la forme d’un haricot, à l’intérieur d’un ragoût extrêmement savoureux d’haricots. Malgré bien repu, impossible de laisser ne serait-ce qu’une cuillère de ce qui me faisait un peu penser à une soupe minestrone. Un vrai délice. C’est indéniable, chef Smiles est un cuisinier hors pair.
Même si aucun anniversaire n’était à célébrer, tout était indiqué pour clore cet extraordinaire repas par le « gâteau du moment par Tamara ». Parce qu’une soirée comme ça, ça a tout le mérite d’être fêté !
Une soirée qui confirme que la maturité ne s’apprend pas : elle se vit. Et le chef Danny Smiles, après avoir joué 10 ans sous les ailes de Chuck Hughes, avoir repris et gérer la restauration de l’Auberge Willow Inn, être revenu à Montréal faire sa gigue (sérieuse) ici et là, était bien rendu à ce stade. Il a su bien s’entourer de professionnels qui étaient aussi au même stade que lui, et le résultat et pour le moins… Solide.
L’ambiance : On sent une atmosphère de type brasserie : on s’entend parler, mais il faut parfois hausser la voix. C’est énergique, confortable et pas gênant du tout.
Ce que l’on mange : Une cuisine d’auteur très maîtrisée et savoureuse.
Ce que l’on boit : De chouettes découvertes à 70$ jusqu’aux grandes trouvailles à 300$, et tout ce qu’il y a entre les deux. Parfois nature, toujours raisonné. Une demi-douzaine de cocktails maison sans fla-fla, ainsi qu’une petite sélection de bières qui ne passe pas à l’histoire, sauf pour la présence d’une Laurentides.
⭐️⭐️⭐️⭐️½
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