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Pour le client normal, l’attention portée aux détails au nouveau comptoir Sushi Nishinokaze dans le Mile End à Montréal sera perçue comme excessive.
Pour les plus ferrés, attentifs et sensibles, cette expérience bouleverse.
Nishinokaze est l’intime (et grandiose) projet du chef Vincent Gee et son associé Julian Doan, deux « obsédés » par le sushi et les traditions japonaises. Formé auprès de Taishi Shintaro Suzuki au prestigieux Nishiazabu Sushi Shin — icône de la gastronomie japonaise et dans la première flotte des étoilés Michelin au Japon —, Vincent Gee apporte à Montréal une expertise rare : celle de l’Edomae.

Ou celle de l’obsession des détails.
Cette quête d’équilibre entre tradition et innovation où le riz (shari), le vinaigre rouge artisanal (akasu), la traçabilité des ingrédients et les techniques ancestrales (affinage, marinage, cuisson douce) sont célébrés jusqu’à la tranche d’orange sanguine de Nokonoshima qui clora le menu orchestré en 20 services.
Le riz est au cœur de la philosophie Edomae. Celui utilisé au Nishinokaze est importé directement d’un seul producteur japonais pour garantir une qualité irréprochable. « Nous utilisons deux types de cultivar naturellement cultivés sans pesticides », souligne Julian, au même moment où j’enfilais un énième nigiri en pleine conscience. « Le premier pour la circonférence du grain, puis le second pour son adhérence », précise-t-il.
Celui-ci est soigneusement cuit sur feu direct dans un hagama en fonte avant chaque service, assaisonné au vinaigre rouge fabriqué à partir de lies de saké millésimé 2006. Contrairement au vinaigre de riz classique, l’akasu apporte une profondeur umami et une douceur naturelle sans ajouter de sucre, permettant au riz de révéler toute sa subtilité.
On est aussi impressionné par les techniques appliquées aux poissons, elles aussi inspirées de la période Edo. Avant d’être soigneusement déposé devant nous, chaque poisson aura été travaillé de manière à aller chercher le meilleur de l’espèce.

Il aura parfois été maturé pendant 5 ou 20 jours, parfois mariné, parfois couvert de sel marin, ou même blanchi dans un bouillon à base de shoyu, avant d’être mariné pendant cinq jours comme on nous explique en déposant le ni-hotate (pétoncle).

Pendant les 150 minutes d’immersion dans l’espace conçu par les architectes Justin Nguyen et Taichi Kuma, faisant également office de galerie d’art vivante puisque Julian Doan partage généreusement sa collection personnelle de céramiques anciennes jusqu’à 400 ans d’âge, on aura droit à une quinzaine de services de poisson et de fruits de mer différents, entrecoupés par une soupe miso d’orge et de jus de tête de crevettes, ainsi que d’un tamago (omelette) et d’un rouleau végétarien.

Le Sushi Nishinokaze offre une expérience d’une vie unique à Montréal (au Canada ?), qui ne laissera personne indifférent.

De la température de la salle à la liste de lecture ; de la céramique jusqu’à la toilette japonaise intelligente ; des crevettes nordiques fraîches servies crues, de celles marinées et servies dans leur propre jus dévoilant un tout autre spectre de ce crustacé ; des œufs frais de saumon sauvage marinés au soya et saké qui se révèlent tout autrement ; du poisson Kohada jusqu’à la liqueur amère Scarlet Amaro d’Iseya distillé à partir de 25 plantes cultivées sans pesticides par un seul artisan.

Une expérience qui déstabilise, qui surprend, qui épate.
Jamais je ne verrai le riz de la même manière.
⭐️⭐️⭐️⭐️⭐️

Ambiance : L’espace minimaliste, avec son comptoir en bois naturel et ses céramiques antiques utilisées pour le service, évoque une galerie d’art vivante. Le comptoir de 8 personnes et la proximité avec l’équipe incitent à la discussion et au partage.
Ce que l’on boit : La carte des vins et de sakés est l’extension de l’expérience raffinée. Des vins et sakés de haute volée, allant de la grande maison jusqu’au petit producteur artisanal. Un accord vins ou sakés est aussi disponible. De mon côté, j’ai pu apprécier un thé vert parfaitement infusé tout au long de la soirée.
Ce que l’on mange : Un menu unique à 431$ incluant les taxes et le pourboire, payable entièrement à la réservation. L’eau, le thé et toute autre boisson alcoolisée sont chargés à part.

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